Les innus sont parmi nous

C’était mon premier contact (conscient) avec des autochtones. Quand j’étais enfant, j’aimais jouer le rôle d’une princesse indienne qui combattait les cowboys. J’avais de la difficulté à comprendre pourquoi, dans les films western américains de l’époque, les indiens étaient toujours les méchants. Cela me rendait triste car mon affection allait spontanément vers ce peuple.

J’ai perçu le fait de pouvoir en fréquenter des vrais, comme une merveilleuse opportunité d’en savoir plus sur ce peuple étrange et fascinant. Les montagnais (nom plus connu) de mon école se tenaient toujours regroupés dans un coin de la salle commune et s’assoyaient dans le fond des classes. Pas facile d’approche… Et en plus, il y avait des rumeurs qui couraient que ce sont des sauvages, des batailleurs, des alcooliques et des idiots…

Je croisais souvent le regard brûlant d’un beau ténébreux. J’ai oublié après combien de temps et par quel miracle, je suis devenue son amie. Ce jeune homme me parlait des anciens de sa tribus, de leur enseignement… Je sentais la profondeur, la sagesse, le respect pour la nature derrière ses propos et ses confidences. Il a semé une graine dans mon terreau fertile et mon intérêt pour les premières nations n’a cessé depuis, de grandir et de m’inspirer dans mon travail de création.

Ce jeune homme désirait soulager la souffrance de son peuple, il me confia qu’il sentait que c’était sa mission. Mon intuition me disait qu’il avait l’âme d’un grand chef comme ceux que j’admirais dans les films. Ghislain Picard est aujourd’hui le plus grand chef du Québec, le Chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador.

Quand, il fait des entrevues publiques, je sens de l’amertume et de la déception dans ses propos face aux nombreuses promesses, jamais tenues, de nos gouvernements. Il a passé sa vie à défendre les droits de son peuple, à tenter de lui redonner sa dignité et sa fierté.

Il ignore ce que son amitié, ses confidences et sa personnalité ont eues comme effet sur moi en tant que personne et artiste (l’une ne va pas sans l’autre). À ma manière, bien modeste, j’apporte ma contribution à sa cause. Je me fais l’ambassadrice spontanée de son peuple à chaque fois que j’en ai l’occasion et cela s’exprime particulièrement dans ma démarche artistique.

Je constate que nous tentons régulièrement de les ignorer, ou encore pire, nous nous donnons bonne conscience en les méprisant alors qu’il nous ont accueillis amicalement sur la terre dont ils ne se considéraient pas propriétaires mais qu’ils honoraient pour sa sagesse et sa générosité. Ils avaient un rapport respectueux (écologique) avec la nature. Nos ancêtres ont profité de leur naïveté et de leur ouverture pour les dominer, les écraser, détruire leur culture, leurs croyances spirituelles, leur honneur et leurs enlever leur dignité. Je suis fière de mes ancêtres irlandais et belges mais sur ce coup là, je les trouve pas mal ordinaires.

Est-ce que nous ne pourrions pas corriger les injustices historiques en commençant par faire l’effort de détruire nos préjugés individuels sur ce qu’ils sont devenus à cause de nous ? Nous avons été plus forts, est-ce que cela justifie notre manque de conscience actuel ? Pourquoi poursuivre l’œuvre de nos ancêtres en les maintenant dans la médiocrité ? Si nous les aidons à retrouver leur fierté et à guérir des blessures que nous leurs avons infligées, nous contribuerons à une grande œuvre humanitaire, dans notre propre cour.

Comments

  1. ghislain picard
    June 6th, 2010 at 09:13PM

    Moi qui suis encore très peu familier avec ces trucs, je suis tombé là-dessus alors que je pensais qu'il y avait trop peu d'ambassadeur.

    Je venais justement il y a quelques jours, de retourner à cette époque où le repli sur soi semblait la chose la plus "safe".

    De toute évidence, les choses ont bien changé.